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Messageries fluviales de Cochinchine, histoire d'un monopole 1/3

Livret du voyageur, 1912

Des origines controversées

L'histoire des Messageries remonte aux années 1870, période où l'amirauté entretenait une troupe de l'ordre de trois mille hommes en Cochinchine et où le port de Saïgon, à l'époque un peu plus de cinquante mille âmes, abritait le Conseil Colonial. Celui-ci, avant Doumer, gérait l'impôt levé sur la population locale de façon discrétionnaire. Autant dire qu'il devait falloir un vrai esprit d'aventure et une poigne solide ou un brevet de natation en eaux troubles pour monter une affaire à l'époque.

Des origines controversées

Une chaloupe au départ de Mỹ Tho vers le delta du Mékong

Une chaloupe au départ de Mỹ Tho vers le delta du Mékong. Image © Belle Indochine

L'origine des Messageries Fluviales de Cochinchine varie selon les sources.

Les fameux frères Victor et Henri Roque, originaires de l'Aveyron1) mais qui étaient déjà depuis longtemps en Asie, approvisionnaient les troupes de Cochinchine à partir des Philippines depuis 1857 et surtout depuis le débarquement de Tourane2) de 1858. Quand l'amirauté appela les entrepreneurs à participer à la construction de la colonie avec l'aide de subventions levées sur la population indochinoise, Victor vint s'installer à Saïgon en 1860, puis fit venir son frère Henri et s'associa en 1870 avec Marcellin Larrieu pour ouvrir les Messageries à Vapeur de Cochinchine3)) qui commençèrent à ouvrir des routes entre Saïgon et le Cambodge, à l'époque jusqu'à Kratié, qui était le point le plus haut réputé navigable du Mékong.

Quelques années plus tard, après l'échec d'un projet dans le domaine ferroviaire, toujours en direction du Cambodge, Jules Rueff4) se tourna vers le fleuve, moyen de communication bien plus naturel dans la région, et fonda les Messageries Fluviales de Cochinchine en 18815). Les Messageries Fluviales, dont le siège était à Paris, furent dès le départ dotées du plus grand capital de la colonie (un million et demi de francs), et obtinrent avant même d'être fondées les subventions jusque là versées aux Messageries à Vapeur et un premier contrat de neuf ans lui assurant le monopole du service postal fluvial6). Elles prirent la haute main sur la navigation fluviale vers le delta et le Cambodge.

Une chaloupe à l'escale, delta du Mékong

Une chaloupe à l'escale, delta du Mékong. Image © Belle Indochine

On crédite souvent les frères Roque de la fondation des Messageries Fluviales, bien que leurs statuts les donnent fondées en 1881. Était-ce un changement de nom d'un commun accord? L'un des frères Roque est-il revenu pour rétablir les Messageries avec Rueff7)? Est-ce un exemple du pouvoir discrétionnaire qu'exerçait le conseil colonial avec l'allocation de son budget? La jungle ne s'est jamais arrêtée à l'entrée de la ville.

Toujours est-il que de très nombreuses entreprises ne voyaient leur survie qu'avec les subventions, et que l'allocation de ces subventions créait un terrain de jeu souvent très inéquitable. On ne trouve pas de trace des Messageries à Vapeur après 1882, et on retrouve les frères Roque au Tonkin dès les années suivantes.

À suivre

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Ce post est un extrait d'un article plus long: Un Bassac au XIXème siècle
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2)
Maintenant Đà Nẵng
3)
Le particularisme des milieux d’affaires cochinchinois (1860-1910): comment intégrer un comptoir asiatique à un empire colonial protégé; Gilles de Gantès, enseignant à Aix-en-Provence (lien
5)
cf. Gantès ibid.
7)
cf. l'incontournable Colonial Cambodia's 'bad Frenchmen', the rise of French rule and the life of Thomas Caraman, 1840-87 de Gregor Muller, 2006.
Dernière modification: 2023/10/19 11:18 [benoit] Copyright (c) 2014-2024 TransMékong 144 Hai Bà Trưng, QNK, Cần Thơ - 0903 033 148